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site littéraire d'auto-édition de Jean-Luc FLINES, auteur indépendant de romans, nouvelles et poésie. Grand admirateur des écrivains américains Paul Auster et Stephen King, Jean-Luc Flines est persuadé que L'imagination, en écriture, c'est l'art de donner vie à ce qui n'existe pas, de persuader les autres d'accepter un monde qui n'est pas vraiment là!

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ARTUS GRAINBÔ, le p'tit pwète crotte-misère (épisode 13)

présente

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ARTUS GRAINBÔ, le p'tit pwète crotte-misère (épisode 13)

Sans se retourner, rien qu’à leur voix, Artus comprit que les vautours étaient de retour, que les chiens avaient retrouvés leur trace. D’un geste prompt, Grainbô enserra la main de Léa dans la sienne. Comme une balle il l’entraîna vers le chœur de la basilique. Des ricanements fusaient de derrière eux. Günther et Hans étaient de forts gaillards bien bâtis mais assez lourds à la détente quand il fallait réagir au quart de tour. Ils se mirent à également à courir mais le jeune couple les avait déjà distancés. Soudain Artus et Léa se séparèrent. Léa se dirigea vers la crypte, enjamba comme une amazone la portière basse et grillagée. Elle fit le tour du déambulatoire, rencontrant les sept chapelles latérales à l’est, et les sept chapelles latérales à l’ouest. Sans hésiter, elle opta pour la chapelle absidiale, dédiée à la Sainte-Famille. Un signe de l’au-delà, sans doute ! Elle se dissimula derrière la statue du Sacré-Cœur offerte par la maréchale de Mac-Mahon et représentant le Christ, les bras ouverts ! Zizouille avait ainsi réussi à semer les deux gros nigauds de Merdalor.

Mais Artus qui s’était fendu à fond pour échapper à ses poursuivants sentait son cœur tambouriner dans la poitrine ! Il avait traversé tout le chœur et réussit à pénétrer sous le petit dôme nord-est. Il fallait qu’il fasse vite malgré qu’il avait distancé les deux salopards de fachos. Il se retrouvait bloqué devant la porte d’entrée du campanile, inaccessible au public. Il leva les yeux et résolut d’escalader les murs jusqu’au sommet de la petite coupole. Avec une agilité, une légèreté et dans un silence de caverne il commença son ascension vertigineuse, agrippés aux pierres en saillie. Son ombre se déplaçait sur les parois de la construction, les petites fenêtres du dôme laissaient filtrer au-dessus des pierres circulaires à l'extrémité supérieure de l’ogive, dont les vitraux, traversés par les derniers rayons de lune, diffusaient une espèce de bleu électrique, de jaune infiltré de violet et de bleu empreint de mystère divin.

Soudain, arrivé à mi-chemin de son escalade, un moellon céda sous la pression du pied d’Artus. L’alpiniste de la basilique dérapa dans sa verticalité et perdit pied pendant un bref instant ! Heureusement qu’il avait les bras solides. Il se hissa lentement et pu reposer le pied sur un parpaing en saillie. En tombant, la pierre qui s’était détachée du mur produisit un bruit infernal dans ce lieu de silence absolu. Günther et Hans avait perçu l’origine de ce tapage et s’étaient précipités sous le dôme nord-est. Ils eurent tôt fait de lever les yeux et de distinguer Artus baigné d’une lumière surnaturelle. La voix de Günther résonna en écho quand il lui lança en ricanant : « Ah !Ah !Ah !....le p’tit crotte misère, la p’tite cuisse de yupin joue au dieu de la grimpe ! T’es mal barré mon bonhomme !

- Tu espères arriver ou comme ça, mon sale youtre !... directement au ciel ou quoi !Ah !Ah !... poursuivit Hans avec sa grosse voix de ballot.

- Tais-toi, Hans, repris son frère, laisse Monsieur Grainbô monter auprès de sa petite môman et de son pôpa ! Il veut jouer les martyres, lui aussi !

Imitant les caïds en se bombant le torse et en plaçant les mains autour de sa taille, il haussa la voix en s’adressant directement à Artus.

- Alors Grainbô t’as l’intention d’aller où comme ça en frisant les murs ?

- T’occupe feignasse, essaie toujours de me rattraper sans t’casser les abatis !

- Chiche, l’alouette ! J’te parie que j’vais te chercher en moins de deux et que j’te fais rejoindre les verts pâturages spécial pour youddi !

-Spéciaux, on dit ! Verts pâturages « spéciaux » du con ! rétorqua Artus tout en poursuivant sa progression vertigineuse.

-Ouais, moi aussi, ajouta, Günther, je vais monter pour te…

- Toi, reste là, coupa Hans et occupe-toi de la Zizouille, elle doit encore être dans la priante, moi je vais aller chercher ce rat puant !

Günther obéit à Hans comme un mouton et regagna le chœur de la basilique. En pénétrant dans l’enceinte sacrée, il remarqua Léa qui redescendait l’escalier de la crypte. Elle bloqua nette et resta immobile tandis que Günther hurla comme un diable : « Zizouille, je vais t’étriper la donzelle ! » Léa se remit en mouvement et descendit les marches qui conduisaient à l’autel principal. Le frère Merdalor l’avait presque rejointe lorsqu’elle glissa dans l’escalier et voulut se rattraper au pied qui supportait le cierge pascal. Celui-ci bascula lentement. Le cierge, par la force d’inertie, se désolidarisa de son socle et vola comme un obus en plein dans la poitrine de Günther qui perdit l’équilibre et qui se retrouva empêtré dans le tapis rouge qui recouvrait partiellement les marches ! Juste avant sa chute, l’énorme candélabre métallique se renversa sur lui et s’écrasa sur sa tête qui se fracassa contre le marbre de la dernière marche. C’était l’enfer dans la basilique. La blancheur du carrare se maculait de sang pissant abondamment du crâne du plus jeune des fils de la poukave galeuse.

Artus arriva au niveau de la voûte de la coupole nord-est. Mais qu’allait-il faire une fois arrivé à son sommet qui lui semblait pratiquement inaccessible ? Impossible de sortir par les fenêtres vitrées. Par contre il distingua à la base du bulbe une ouverture assez étroite qui communiquait avec l’extérieur. Il se déplaça latéralement en surveillant Hans qui, en bas, se traînait péniblement suant, soufflant de rage mais motivé par la rage d’estourbir « son petit youtre » ! Artus se faufila aisément par l’orifice et se retrouva en plein vent sur la corniche étroite de la coupole nord-est ! Il ne manqua pas de découvrir le magnifique panorama qui s’offrait tout autour de lui en cette fin de nuit magique. Après un moment, un long moment irrésistible d’admiration, il passa la tête par la lucarne pour voir où en était Hans dans sa grimpette vertigineuse ! Il était cramoisi de rage.

"O Douceurs, ô monde, ô résonance de la blancheur du Sacré-Coeur ! Et là, le corps crispé, les sueurs, la chevelure et les mirettes globuleuses et injectées. Et les larmes blanches, bouillantes, - ô douceurs ! - et la voix de crécelle arrivée au sommet des coupoles des volcans et des vitraux aveuglants. " Le voilà, le gros trouillard de Hans, le fabuleux brûleur de cervelles… récita Artus d’un air moqueur.

- Ta gueule, bouillon de p’tit merdeux ! Attends, la fouine, je vais te baptiser au sécateur et te faire bouffer ton bout de poireau, espèce de pied plat de futur macchabée ! rétorqua Hans qui n’était plus qu’à deux enjambées de la sortie empruntée par Artus.

Ce dernier le laissa arriver au haut et lui fit un doigt d’honneur en s’esquivant par-dessus la rambarde de la coupole. Il se laissa glissé le long du gros câble servant de paratonnerre et se retrouva sur le toit incliné entre les deux coupoles. Il passa le muret, assura son équilibre sur l’arrête du chevet et se retrouva nez à nez avec la statue vert de gris de Saint-Michel terrassant le dragon. Ce dernier impressionna Artus, il ressemblait fort à un crocodile, ce dragon ! Le sourire aux lèvres il salua l’archange vainqueur puis se retint à son épée pour poursuivre son chemin sur l’arête et, enfin, se laissa glisser le long du chevet inférieur pour aboutir au pied du campanile. Il leva la tête et put apprécier les nonante et un mètres de la tour. Hans était déjà en train de se glisser le long du paratonnerre. Artus, ramassa quelques cailloux tombés des parois du bâtiment, les fourra dans sa poche et se retourna furtivement. Il entreprit l’escalade du campanile, s’accrochant aux premiers moellons saillants. En fait, il ne savait pas exactement où finirait cette course vertigineuse. Il commença à paniquer. Il n’avait pas beaucoup de prise au bas du campanile.

Hans rejoignait, à son, tour Saint-Michel. Artus surmonta sa peur et souleva son corps de ses bras fatigués jusqu’à une petite fenêtre dont le carreau était en partie brisé. Il passa la tête par l’ouverture et se faufila comme une anguille à l’intérieur du campanile. Par chance pour lui, on y avait installé un échafaudage destiné à l’entretien du mécanisme de la Savoyarde, la plus grosse cloche mobile du monde !

Son poursuivant tenait vraiment à l’attraper et avait surmonté sa peur pour arriver jusqu’à lui. Il en était encore plus gonflé de férocité ! Il suivit le même chemin qu’Artus avait emprunté pour pénétrer dans le campanile. Le p’tit pwète funambule, lui, avait déjà grimpé la moitié de l’échafaudage. Il s’arrêta un instant pour contempler le battant de la cloche qui était suspendu à sa verticale, s’agrippa à la corde attachée à ce battant de huit cent cinquante kilos et au moins cinq fois plus gros que sa pauvre tête. Il n’y avait aucun danger pour que la cloche s’ébranlât car elle ne sonne habituellement qu’à onze heures le dimanche. Hans venait de pénétrer dans le campanile. Instinctivement, il leva la tête et vit Artus suspendus au bout du battant d’airain. Ses jambes et ses mains serraient la corde.

Soudain, il se balança et attrapa l’une des deux grandes roues du balancier fixé de chaque côté du joug de la cloche. Là il pouvait facilement s’y asseoir comme sur une balancelle. Hans lui lança : « Alors Quasimodo, pauv’ cloche, tu espères monter en enfer plus vite que moi ! Ah ! Ah ! À cela Artus répondit par une préparation de tir à la catapulte ! Il ajusta un des cailloux récoltés sur le toit de la basilique dans la bande souple de son arme, étira les élastiques au maximum et visa de son œil en direction de Hans.

- Pardieu, minable chien, charogne de vampire assoiffé de mômerie, je vais te ficher cette caillasse entre les deux mirettes ! »

Artus lâcha l’élastique et le projectile partit en direction de Hans qui l’esquiva habilement. Une grimace vengeresse déforma complètement son visage. D’ailleurs, tout son corps n’était plus qu’une contorsion hargneuse. Un crâne bosselé par les veines qui gonflaient sa tête de porc adipeuse hérissée de touffes de crin jaune ; entre les deux yeux, une veine frontale apparaissait en saillie comme si une bête rampante s’était infiltrée sous sa peau bubelée. Ses doigts crispés mimaient l’étranglement tandis que ses grosses lèvres baveuses frémissaient comme la bouche d’un poisson en quête d’air frais. Toute cette disgrâce lui donnait une allure ridicule mais vigoureuse, de méchanceté et de folie ; sublime ressemblance exceptionnelle à sa mère qui voulait que le physique de son horrible rejeton résulta d’une dysharmonie sans doute voulue par un dieu teuton qui l’avait engrossée. Tel était le champi de Paris né de la cuisse gauche d’une truie infectée par la trivialité répulsive que la nature avait concocté dans l’antre maudit d’un ventre graveleux. On eût dit un crapaud tourmenté et mal assemblé.

Lorsque cette hybridation de batracien et d’homo sapiens grimpa sur l’échafaudage du campanile, ramassé sur lui-même, courtaud, et presque aussi laid que méchant arriva sous le battant, Artus lui asséna un nouveau projectile qui passa une fois de plus à côté de son poursuivant et fit tinter la lèvre inférieure de la cloche en même temps que Hans lui lançait goulûment :« Tu ne sais pas viser p’tit piaf ! Tu tires comme à… »

Mais il n’acheva pas sa phrase car un deuxième projectile le toucha entre les deux yeux. Un petit point rouge apparu sur le front de Hans. Le trou s’élargissait comme si la veine avait éclaté et à présent l’affreux badouillard pissait le sang qui dégoulinait sur son œil, le long de sa joue, jusque dans son cou. Il devenait fou ! Il hurla à la mort comme un loup blessé et ravagé par un incendie intérieur. Il s’accrocha directement à la boule du battant tandis qu’Artus se redressait et se mit à se balancer d’un côté à l’autre sur la roue du joug. À sa grande surprise, Artus, remarqua que la cloche bougeait légèrement. Il accentua le mouvement de va-et-vient latéral en se déhanchant ! Le visage de Hans aveuglé de sang se crispa encore plus, laissant apparaître un masque encore plus hideux. Il demeurait cramponné au battant de la Savoyarde et plus Artus se balançait, plus la tête de son adversaire se rapprochait du bord de la cloche ! Il hurlait comme un fou : « Non, Artus, arrête, arrête, on voulait simplement plaisanter, mon frère et moi, parce qu’on t’aime bien, tu sais, on voulait simplement te taquiner et puis… »

Subitement, déséquilibré, Hans lâcha son perchoir d’airain, glissa le long de la corde mais n’eut plus la force de se cramponner à la corde tandis que la cloche résonnait à chaque mouvement ! C’était horrible, le son lourd et perçant obligea Hans à porter les mains à ses oreilles. Évidemment ce réflexe le désolidarisa de la corde et il se retrouva dans le vide. Une chute vertigineuse le fit aboutir tout en bas du campanile. Le crapoussin à sa maman Merdalor baignait dans une mare de sang épais et malodorant !

Artus avait sorti son épée de bois coincée dans sa ceinture, la leva vers le ciel et, sur les derniers tintements de cloche, prononça une sorte d’oraison funèbre empruntant pour cela un ton solennel, tel un chevalier après un combat acharné qui aurait demandé l’aide d’un dieu improbable :

« Seigneur, quand vaine est la poursuite,

Quand dans le campanile résonne la Savoyarde,

Et que le glas a sonné la fin d’un combat...

Dans mon âme blafarde

Faites disparaître les cancrelats

Les vils crapauds à ma poursuite

Armée délirante aux rires montmartrois,

Les lâches poursuivants détruisent notre jeunesse !

Vous, emportés par les sons d’airain,

Dans les rues de la butte enchanteresse,

Sur la place du Tertre et sur les toits

Riez au vent nouveau qui passe dans nos mains !

Par milliers, dans la rue Mouffetard,

Où chantent les zizouilles et les piafs,

Tournoyez, sur des musiques de liberté !

Pour que chaque enfant des boulevards

Soit dans le cœur des poètes d’épitaphes

Ô notre bonheur d’un jour éparpillé !

Mais, anges de notre cité d’en haut,

Cortège perdu dans le soir des chansonniers,

Laissez les refrains et les couplets si gais

Pour ceux qui ont souffert de cette guerre de salauds

Dans le froid d'où l'on ne peut revenir éveillés,

Dénoncés lâchement par des mouchards très laids ! »

ARTUS GRAINBÔ, le p'tit pwète crotte-misère (épisode 13)

Artus fut interrompu dans sa prière par une lumière qui venait du bas et dirigée vers le sommet du campanile. Il se pencha par l’ouverture des abassons et, ébloui par un projecteur puissant, il put, malgré tout, distinguer le manège des voitures de police et les agents encercler l’arrière de la basilique. Grainbô distingua parmi la foule la frêle silhouette de Léa et la corpulence hors norme de Vercoton. La Zizouille avec évidemment pu échapper à Günther puisque celui avait été mis hors-jeu grâce à la chute du haut candélabre. Elle avait vite été prévenir Vercoton et tous ses amis de leur aventure nocturne. Ils avaient averti la police qui fit diligence et un assaut se préparait dans l’enceinte du Sacré-Cœur. Tout le village de Montmartre était d’ailleurs sur place, intrigué par les sonnailles de la Savoyarde une nuit de semaine ordinaire. Ayant aperçu ses amis, Artus saisit son béret noir et l’agita à travers les volets inclinés de l’abasson. Il cria de toutes ses forces mais personne ne l’entendait à cette hauteur et avec tout le tumulte autour de la basilique. Alors il descendit ses bretelles sur son pantalon et enleva sa chemise qu’il fit flotter au bout de son épée de bois en la faisant tournoyer. Léa le remarqua et cria dans la direction de Vercoton : « Regarde, le Grainbô est vivant, il s’est foutu à poil pour mieux qu’on le voit !... Quel balèze cet Artus ! Faut qu’on l’sorte de c’t’ embrouille ! » Mais Artus ayant vu nettement le comité d’accueil qui lui était réservé, refit le chemin inverse deux fois plus vite qu’à l’aller et salua le Saint Michel en repassant. Il avait frôlé le corps ensanglanté de Hans en fermant les yeux et en croisant les doigts pour que plus rien de semblable ne puisse leur arriver, à lui et à sa chère Zizouille.

Vercoton, Léa, Gavroche, Monsieur Victor, Monsieur Aristide, et quelques gamins de la butte pénétrèrent dans le chœur de la basilique pour accueillir Artus en l’embrassant chaleureusement, heureux de le voir sain et sauf et très fier qu’il s’en soit tirer en héros ! La police emmena discrètement les corps sans vie des frères Merdalor. Malgré cette note macabre, la joie était à son comble ! Progressivement, on entendit une voix s’élever du fond du lieu saint. Un silence s’en suivit. Tout le monde se tourna dans la direction de cette voix qui vibrait tout en échos. Ils distinguèrent une petite silhouette en robe noire, qui s’avançait dans la lumière vers eux. C’était Madame Édith Piaf qui chantait « Les amants de Paris »

«….. A Paris les amants s'aiment à leur façon

Les refrains que je leur dis

C'est plus beau que les beaux jours

Ça fait des tas de printemps et le printemps fait l'amour.

Mon couplet s'est perdu

Sur les bords d'un jardin

On ne me l'a jamais rendu

Et pourtant je sais bien

Que les amants de Paris m'ont volé mes chansons

A Paris les amants ont de drôles de façons...

Les amants de Paris se font à Robinson

Quand on marque des points à coups d'accordéon

Les amants de Paris vont changer de saison

En traînant par la main mon petit brin de chanson.

Y a plein d'or, plein de lilas

Et des yeux pour les voir ... »

Léa et Artus se serraient très fort en écoutant Madame Edith et une larme coula sur la joue de la petite reine de Montmartre. Edith Piaf les entoura chaleureusement et, tous ensemble, ils descendirent les marches du parvis de la basilique sous les acclamation nourries d’une bonne partie du quartier qui s’était réuni pour célébrer leur héros du jour. Madame Piaf souleva Artus et le plaça sur ses frêles épaules tout en descendant de la butte par l’enfilade d’escaliers.

Puis le film s’arrêta, arrêt sur image. La fête, une nouvelle fête, prolongea cette issue heureuse et dura, paraît-il deux jours. Il paraît aussi que Victor Hugo récita un poème qui toucha particulièrement Artus :

« Lorsque l'enfant paraît, le cercle de famille

Applaudit à grands cris.

Son doux regard qui brille

Fait briller tous les yeux,

Et les plus tristes fronts, les plus souillés peut-être,

Se dérident soudain à voir l'enfant paraître,

Innocent et joyeux.

Soit que juin ait verdi mon seuil, ou que novembre

Fasse autour d'un grand feu vacillant dans la chambre

Les chaises se toucher,

Quand l'enfant vient, la joie arrive et nous éclaire.

On rit, on se récrie, on l'appelle, et sa mère

Tremble à le voir marcher.

Quelquefois nous parlons, en remuant la flamme,

De patrie et de Dieu, des poètes, de l'âme

Qui s'élève en priant ;

L'enfant paraît, adieu le ciel et la patrie

Et les poètes saints ! la grave causerie

S'arrête en souriant.

La nuit, quand l'homme dort, quand l'esprit rêve, à l'heure

Où l'on entend gémir, comme une voix qui pleure,

L'onde entre les roseaux,

Si l'aube tout à coup là-bas luit comme un phare,

Sa clarté dans les champs éveille une fanfare

De cloches et d'oiseaux ... »

ARTUS GRAINBÔ, le p'tit pwète crotte-misère (épisode 13)
ARTUS GRAINBÔ, le p'tit pwète crotte-misère (épisode 13)
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